L’île de la Réunion, un territoire ultramarin vulnérable qui pourrait être impacté par le changement climatique.
2,7 millions de Françaises et Français vivent en Outre-mer, soit 4% de la population. Avec les Outre-mer, la France possède le 2ème domaine maritime mondial qui comprend 10% des récifs coralliens et lagons de la planète et 20% des atolls. Au total, sur une superficie inférieure à 0,1% des terres émergées, ce sont plus de 3 450 plantes vasculaires et 380 vertébrés qu’on ne trouve nulle part ailleurs, soit davantage que dans toute l’Europe continentale. Les Outre-mer abritent ainsi 98% de la faune vertébrée et 96% des plantes vasculaires de la France, dont une grande partie se trouvent dans les sept millions d’hectares de forêt tropicale de Guyane*.
Les Outre-mer sont les territoires de France les plus vulnérables et les premiers impactés par le changement climatique alors qu’ils émettent peu d’émissions de GES. Les inégalités de responsabilités et d’impacts face au réchauffement climatique sont donc importantes entre la France hexagonale et la France d’Outre-mer. La grande vulnérabilité des territoires ultramarins face au dérèglement climatique s’explique par des facteurs géographiques :
la plupart de ces territoires sont des îles, situées dans l’hémisphère Sud. Mais cette vulnérabilité « naturelle » est renforcée par des facteurs politiques et institutionnels, par l’histoire coloniale de ces territoires et leurs statuts juridiques particuliers. Le droit à la protection de la santé et à un environnement sain sont deux défis majeurs à relever dans les territoires ultramarins.
Disparition des terres et augmentation des événements extrêmes

Les padzas de Dapani à Mayotte : l’érosion est également une des conséquences du réchauffement climatique.
Les impacts physiques du changement climatique en Outre-mer sont de même nature qu’en métropole mais largement amplifiés : érosion côtière, submersion marine, réchauffement et acidification des océans… La biodiversité est la première touchée. En Polynésie française, mais pas seulement, le réchauffement de l’océan menace les récifs coralliens et les mangroves, qui, au-delà d’accueillir une très importante biomasse, sont une barrière naturelle protégeant les côtes de l’érosion et des vagues trop importantes. Leur disparition contribuera à augmenter le phénomène d’intrusion de l’eau de mer salée dans les nappes souterraines et les eaux de surface. En moyenne, le niveau des océans dans les territoires ultramarins s’est élevé de 3mm par an. Leur caractère côtier et bien souvent insulaire augmente fortement les menaces sur l’habitabilité de certaines zones. A terme, les Caraïbes, comme les atolls du Pacifique mais aussi les îles de l’Océan Indien sont menacées de disparition.
En parallèle, les territoires ultramarins sont plus exposés à l’augmentation et à l’intensification des événements météorologiques extrêmes. Les Petites Antilles du Nord (Saint-Barthélémy et Saint-Martin) sont exposées à des cyclones plus fréquents et plus intenses, avec des vagues de 6 à 9 mètres et des vents de plus de 300 km/h en rafales. L’ouragan de catégorie 5 Irma qui s’est abattu sur l’île de Saint Martin en 2017 compte parmi les dix plus puissants cyclones des cent dernières années. Les dégâts ont été catastrophiques : 95% des édifices ont été endommagés, dont 30% totalement détruits. 4 000 voitures – 90% du parc automobile – sont devenues des épaves. Après la catastrophe, la reconstruction des infrastructures et le maintien des services publics a été difficile. Les conditions de vie des habitants se sont détériorées avec la multiplication des bidonvilles dans des zones fortement exposées aux risques d’inondation et de submersion. L’ouragan Irma est devenu la catastrophe naturelle la plus coûteuse de l’histoire de l’assurance Outre-mer : 1,26 milliard d’euros de dégâts ont dû être indemnisés dans les Antilles françaises.
Impacts sur la santé des habitants

Echouage d’algues sargasses le long du littoral en Martinique.
A la fragilité des systèmes de santé dans les territoires ultramarins, s’ajoutent les impacts sanitaires des changements climatiques. A ces vulnérabilités déjà présentes, s’ajoutent les impacts sanitaires des changements climatiques. L’évolution des températures et des précipitations jouent sur la multiplication des insectes, comme le moustique, porteurs de maladies vectorielles : paludisme, dengue, chikungunya, fièvre du Nil occidental, etc. L’élévation des températures des océans pourrait aussi être l’un des facteurs explicatifs de l’augmentation des sargasses, qui sont des algues brunes relâchant des gaz nauséabonds et potentiellement toxiques, dans les Antilles. Les conséquences des changements climatiques sur les ressources alimentaires et en eau potable sont importantes pour ces territoires, notamment du fait de la salinisation des sols et des sources d’eau potable, avec des conséquences sur la santé des habitants. Ces éléments influencent également le développement de maladies digestives et alimentaires comme la ciguatera (maladie alimentaire causée par la consommation de poissons contaminés avec une toxine appelée « ciguatoxine »).
Impacts économiques

La commune du Gosier en Guadeloupe, l’une des destinations touristiques de l’archipel de la Guadeloupe.
La plupart des activités économiques en Outre-mer sont menacées par le changement climatique : le tourisme, la pêche, l’agriculture et l’industrie agro-alimentaire. L’attrait touristique de l’Outre-mer est fortement lié aux conditions climatiques et à son patrimoine naturel exceptionnel. Le dérèglement climatique aura des conséquences sur la durée de la saison touristique, les conditions de séjour (confort et coût) et sur l’attractivité des territoires ultramarins. La pêche est la deuxième activité économique en Polynésie française tandis qu’elle a une fonction vivrière à Wallis-et-Futuna et à Mayotte. Les changements climatiques affecteront les ressources halieutiques et entraîneront une dégradation de la sécurité alimentaire des populations dépendant de la pêche vivrière. Les modifications des conditions climatiques impactent aussi fortement l’agriculture en Outre-mer, notamment les productions de sucre, de bananes et de melons à La Réunion, en Guadeloupe et en Martinique. Le déficit hydrique et les sécheresses impactent également l’élevage et l’agriculture vivrière comme la production de manioc, mais aussi la production électrique liée au barrage hydroélectrique.
Impacts sur les droits des peuples autochtones
Plusieurs peuples autochtones ont survécu à la colonisation française : le peuple Kanak de Nouvelle-Calédonie et les six peuples autochtones de Guyane. Ces peuples vivent dans des territoires très impactés par les dérèglements climatiques. Leurs moyens de subsistance, leurs modes de vie et leurs cultures sont menacés. Les peuples autochtones sont particulièrement vulnérables aux changements climatiques alors que leur mode de vie, respectueux de la nature, n’émet quasiment pas de gaz à effet de serre.
Des actions à mettre en œuvre dès maintenant
Le GIEC a analysé plus de 200 scénarios visant des réchauffements inférieurs à +2°C d’ici la fin du siècle. Le résumé pour les décideurs présente 4 grandes familles de scénarios :

Forte amélioration de l’efficacité énergétique

Forte réduction de la consommation par personne

Fort usage de technologies d’absorption de CO2

Contribution moyenne des trois approches précédentes
Au-delà des différences existantes entre ces approches, le GIEC souligne ce qu’elles partagent en commun :
- Des émissions de gaz à effet de serre moindres, nulles, puis négatives
- Décarboner l’énergie
- Efficacité et sobriété énergétique
- Capture et séquestration du carbone
Le GIEC estime le coût des investissements à faire pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C à environ 2 400 milliards de dollars par an entre 2016 et 2035, soit 2,5% du PIB mondial. Ces investissements doivent être orientés vers l’efficacité énergétique et les solutions bas carbone.
L’amplification du réchauffement climatique aura des conséquences néfastes sur la pauvreté et les inégalités partout dans le monde, y compris au sein des pays développés. La lutte contre le changement climatique peut et doit nécessairement s’accompagner d’une lutte pour la justice sociale. Cette lutte ne doit pas être portée par les seules épaules des institutions publiques. La société civile, le secteur privé, les institutions scientifiques, les groupes locaux, les individus ont tous leur part à prendre. Des coopérations approfondies entre ces différents acteurs rendront plus efficaces les initiatives et les politiques de lutte contre le réchauffement climatique.
Le programme SEIZE s’inscrit dans cette logique de lutte contre le changement climatique en mettant au centre de son action l’efficacité et la sobriété énergétique et en se positionnant comme un nœud du réseau des acteurs locaux engagés dans la transition énergétique au travers sa plateforme de sensibilisation, de conseils et d’orientation à destination des entreprises et collectivités.